Programme du jubilé de l’église Notre-Dame de la Visitation de Rochefort

Cette année à Rochefort, l’église Notre-Dame de la Visitation a 150 ans. Pour fêter ce jubilé, diverses célébrations et animations ont été, sont ou seront organisées.

Le Cercle Culturel et historique a tenu à participer à cet anniversaire. En collaboration avec la fabrique d’église et la paroisse, les activités suivantes sont mises sur pied :

-        L’exposition bisannuelle sur le patrimoine religieux des églises et chapelles du grand Rochefort présente quelques éléments remarquables du trésor de l’église ;

-        Une nouvelle signalétique a été mise en place à l’intérieur du bâtiment, elle permettra de mieux apprécier les divers éléments remarquables de l’édifice ;

-        Des visites guidées seront organisées durant le week-end des Journées du Patrimoine (les 7 & 8 septembre, à 14 et 16 heures) ; des visites guidées de groupes peuvent également être demandées ;

-        Enfin, pour clôturer l’année en cours, un cahier racontant l’histoire de l’église, des précédentes, ainsi que les différentes manifestations organisées sera disponible en décembre.

Renseignements

Presbytère de Rochefort – 084/211 277 de 10 à 12 et de 14 à 17 heures.

Photos de la Fabrique d'église

Jean-Luc Fivet

Le couronnement de la Vierge : trésor classé, dans une église inventoriée !

L’église Notre-Dame de Dieupart est réputée pour abriter l’une des toiles classées Trésor exceptionnel de Wallonie mais elle mérite également d’être reconnue pour le dynamisme dont fait preuve la fabrique d’église et le sacristain, à qui l’on doit un inventaire de qualité.

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Le massacre des innocents, une œuvre de Louis Finson

Fig. 1. Louis Finson, Le massacre des innocents, dans la nef latérale © Elisabeth Dekoninck.
Fig. 1. Louis Finson, Le massacre des innocents, dans la nef latérale Est © Elisabeth De Coninck.

   Louis Finson

1615

Peinture sur toile

400 x270 cm

Eglise Sainte-Begge, Andenne

Propriété de la fabrique de l’église Sainte-Begge, Andenne

Classé le 26 mars 2010 – M.B. 28 septembre 2010

Andenne, ville mosane dans la province de Namur, conserve aussi une toile peinte classée. Celle-ci est conservée dans la collégiale Sainte-Begge. Découvrons ensemble l’œuvre.

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Les sept joies de Marie de Lancelot Blondeel et Pierre Pourbus

Fig. 1. Lancelot Blondeel, Les sept joies de Marie  © IRPA-KIK, Bruxelles, X118445.

Attribué à Lancelot Blondeel (en collaboration avec Pierre Pourbus ?)

Vers 1545-1550

Peinture sur panneau

134 x 104 cm

Cathédrale Notre-Dame, Tournai

Propriété du Chapitre cathédral, Tournai

Classé le 9 juin 2010 – M.B. 26 octobre 2010

L’œuvre de Lancelot Blondeel et Pierre Pourbus, considérée comme majeure pour le XVIe siècle, met en scène la dévotion populaire liée aux événements de la vie de la Vierge Marie submergée par des éléments architecturaux massifs[1]. C’est d’ailleurs sur la représentation de cette architecture que se basèrent sans doute les historiens d’art afin d’attribuer la composition au brugeois Lancelot Blondeel[2]. Il est vrai que ce peintre est  connu pour être « très habile dans l’architecture» comme le rappelle Carel Van Mander dans sa célèbre Histoire de la vie des peintres[3]. En outre, si l’on compare l’œuvre de Tournai à la Notre Dame à l’Enfant entourée de Saint Luc et Saint Gilles conservée la cathédrale Saint Sauveur de Bruges[4], nous retrouvons ce même goût pour une architecture en symétrie axiale verticale au centre de l’œuvre ; pour un décor luxuriant et pour une mise en retrait de la scène iconographie au profit d’une ouverture en arc de triomphe au centre bas de l’œuvre. Pour autant, cette œuvre qui ne proviendrait pas de l’ancien mobilier tournaisien selon le chanoine Joseph Warichez en 1934-35[5] bien que Jean-Auguste Druon Cardinael l’attribuait à Jean Cousin dans son Calendrier Tournaisien quelque cent-soixante ans plus tôt, 1775[6], fut rendue au gendre de Blondeel, Pierre Pourbus[7], à la moitié du siècle dernier par Paul Eecklout[8] puis, à sa suite, par Paul Huvenne[9]. Accordons nous à dire que l’œuvre est probablement l’une des toutes premières peinte par Pierre Pourbus alors en formation dans l’atelier de Blondeel. Il s’agirait donc selon toute vraisemblance d’une œuvre collaborative exceptionnelle.

   

Fig. 2. Lancelot Blondeel, Les sept joies de Marie © IRPA-KIK, Bruxelles, X128222, X128224, X128227, X128228.

Bien que perdues dans ce faste architectural, les sept joies de la Vierge sont bel bien toutes représentées :  Annonciation et Visitation de part et d’autre de l’arche au bas de la composition qui s’ouvre sur un large paysage en perspective mettant en scène la Nativité, l’Adoration des Mages et l’Assomption ; tandis que la partie supérieure présente le Christ ressuscité apparaissant à Marie et la Pentecôte. Ainsi placées, les différentes scènes se déroulent au sein de la même et grandiose architecture anguleuse et symétrique mis en avant par un puissance clair obscure. Réalisée dans des tons de beige, de rouge et de gris bleuté, la composition fait, comme le veut la période artistique, la part belle aux nombreux puttos apportant des fruits ou tenant nonchalamment une guirlande de fleurs composée tout au plus de quelques discrets festons.

Il n’est donc pas surprenant que parmi les quelques trente six peintures ou ensembles peints ayant eu l’honneur d’être classés par la Fédération Wallonie-Bruxelles, Les 7 joies de la Vierge fut l’une des premières à avoir été reconnue Trésor du patrimoine. À ce titre, cette peinture datant des alentours de 1550, ne pourra jamais quitter définitivement le territoire national belge. La Fédération Wallonie-Bruxelles, après avoir veillé à sa restauration en 2019, se doit d’en assurer la préservation et la protection. Joyaux du patrimoine, cette composition à l'architecture rigoureusement mathématique comme  tend à le démontrer les marques de compas et de lignes strictes révélées lors de l’étude du tableau par l’IRPA de Bruxelles, ne cesse de nous fasciner. En outre, la quantité de détails présents au sein de cette composition de petites dimensions exposée dans le Trésor de la Cathédrale Notre-Dame de Tournai attire curieux et historiens d’art soucieux de la préservation du Patrimoine de même que la châsse de Notre Dame faisant  quant à elle partie des sept merveilles de Belgique.

Fig. 2. Lancelot Blondeel, Les sept joies de Marie © IRPA-KIK, Bruxelles, X118446, X128217, X128218, X128219.

Nathalie Fraquet

[1] Jean DU MOULIN et Jacques PYCKE, La cathédrale Notre-Dame de Tournai et son trésor, Tournai : Casterman, 1972, p. 57

[2] Lancelot BLONDEEL, (Poperinge1498- Bruges 1561) fut peintre, cartographe et ingénieur. Tout d’abord maçon, il réalisa un arc de triomphe en 1520 à Bruges pour la Joyeuse entrée de Charles Quint ainsi que trois « tableaux vivants » apposés sur l’arcs de triomphe érigé en 1549 pour l’entrée de Philippe II.

[3] Karel VAN MANDER, Het Schilder-Boeck, Haarlem : Passchier Wesbusch, 1604, T.1, p.64

[4] Lancelot BLONDEEL, Notre Dame entourée de Saint Luc et Saint Gilles, 1545, huile sur toile, 138 x 98 cm, Bruges, Cathédrale Saint Sauveur, Trésor, n°13. Oeuvre datée, monogrammée et comportant la truelle chère à Blondeel qui a commencé sa carrière comme maçon.

[5] Joseph WARICHEZ, La Cathédrale de Tournai, Bruxelles : Nouvelle Société d’édition, 1934-1935, Vol 2, p. 22.

[6] Jean-Auguste DRON CARDINAEL, La Description abrégée de la ville et cité de Tournay, de commerce et des meilleures peintures & sculptures dont les églises sont décorées, dit « Calendrier tournaisien », Archives et Bibliothèques de la Cathédrale de Tournai, Calendrier 1775 [Non côté].

[7] Pierre POURBUS (Gouada 1523-Bruges-1584) fut peintre, dessinateur, ingénieur, cartographe. Peu de temps après son inscription à la guilde des sculpteurs et selliers de Bruges (Guilde saint Luc), en 1543, il épousa Anna, la plus jeune fille du Peintre Lancelot Blondeel qui n’avait pas d’héritier masculins : Marc DE BEYER et Josephina DE FAWN, Pieter Pourbus : maître peintre de Gouda, catalogue d’exposition, musée de Gouda, 17 février- 17 juin 2018, Gouda : Museum Gouda, 2018.

[8] Afin de confirmer l’attribution à Pierre Pourbus, Les 7 joies de la Vierge de Tournai aurait été prêtées au musée de Gand pour y être comparées à une Annonciation, elle même attribuée à Pierre Pourbus et offerte au Musée de Breda Par Me. Van Buuren : Françoise LECHIEN-DURANT, Le Musée David et Alice van Buuren : maison de mémoire, Bruxelles : Racine, 2000, p. 7.

[9] Paul HUVENNE, Pierre Pourbus : peintre Brugeois, 1524-1584, catalogue d’exposition, Bruges, Musée Memling (Hôpital Saint-Jean) 29 juin-30 septembre 1984, Bruges : Crédit Communal, 1984 p. 130-132.

Bibliographie

BÜCKEN V., Les sept joies de Marie, dans JAFFRE G. et MARCHANT C. (sous la coord.), Trésors classés en Fédération Wallonie-Bruxelles, Protection du Patrimoine culturel, vol. 1, Stavelot, 2015, p. 213.

DENHAENE G., « Blondeel, Lancelot », dans Dictionnaire des peintres belges : du XIVe siècle à nos jours depuis les premiers maîtres des anciens Pays-Bas méridionaux et de la principauté de Liège jusqu’aux artistes contemporains, Bruxelles, 1995.

HUVENNE P., Pierre Pourbus. Peintre brugeois 1524-1584, Bruges, 1984, pp. 131-132, (avec bibl.antérieure).

JANSEN L., « Les sept joies de Notre-Dame » dans Bruges et la Renaissance. De Memling à Pourbus, Bruges, 1998, vol. 2, p. 116.

Actes du colloque - la châsse de Saint Hadelin

En octobre dernier s'est tenu à Visé un colloque commémorant l’arrivée des chanoines de Celles à Visé en l’an 1338, accompagnés du joyau de l’art mosan qu’est la châsse de saint Hadelin.  Les Actes de ce colloque sont publiés dans le nouveau numéro des « Nouvelles Notices Visétoises » qui sont sortis dans le courant du mois de juin. Cette publication, riche de plus d’une centaine d’illustrations, compte 72 pages et est entièrement consacrée aux Actes du colloque « Autour de Saint Hadelin ». Vous y trouverez les textes « Visé au Moyen Age, terre d’accueil pour douze chanoines et un trésor » et « L’église de Visé : son histoire jusqu’à nos jours » (signés de Claude Fluchard, historien et président de la SRAHV), suivis de « L’église de Celles et ses particularités » et « La vallée de la Lesse et ses châteaux » (de Jacques Lebrun, président de l’asbl « Tourisme et Culture » de Celles), « La châsse de saint Hadelin de Visé et la question des remplois dans l’orfèvrerie mosane » (de Hélène Cambier, conservatrice du Musée diocésain de Namur), « Etude d’un coffret de la collégiale de Celles et de ses restes antiques et médiévaux » (de Aurélie Stuckens, responsable scientifique à la Maison du patrimoine médiéval mosan de Bouvignes), « La Confrérie Notre-Dame de Lorette et Saint-Hadelin » (de Martin Purnode, vice-président de la Confrérie) et, pour terminer, « L’art mosan de 1000 à 1250 : Contexte artistique » (de Sophie Balace, conservatrice au sein du département des arts décoratifs européens aux Musées royaux d’art et d’Histoire de Bruxelles).

Fig. 1. Châsse de saint Hadelin. Photo © IRPA-KIK, Bruxelles, X035203.
Fig. 1. Châsse de saint Hadelin. Photo © IRPA-KIK, Bruxelles, X035203.

Informations pratiques

Cet ouvrage sera vendu 10 € au bureau du musée régional (31 rue du Collège 4600 Visé). Vous pourrez également l’acquérir en versant la somme de 15 € (frais de port compris) sur le compte de la SRAHV : BE89 1030 7312 0385. Mention « NNV 167 ». Infos et renseignements au 04 374 85 63 ou par mail auprès de Mme Zecchinon (museeregional@vise.be).

Marylène Zecchinon, conservatrice du musée régional de Visé

Société royale Archéo-Historique de Visé et de sa région (S.R.A.H.V.)

Musée régional d'Archéologie & d'Histoire de Visé

31 rue du Collège 4600 Visé | Tél. heures de bureau : 04/374.85.63 (ouvert du lu au ve de 9h à 12h et de 14h à 17h)

Musée actuellement fermé (pour rénovation)

Site web : www.museedevise.be

Compte bancaire SRAHV : BE89 1030 7312 0385

BCE 0425788527

 

Pour en lire plus : https://cipar.be/2021/07/14/les-chasses-conservees-dans-le-diocese-de-liege/

Genèse du sauvetage de la toile monumentale de Théodore-Edmond Plumier ornant le maître-autel de l’église Sainte Catherine en Neuvice à Liège : Le Martyre de Sainte Catherine

 

Théodore-Edmond Plumier ornant le maître-autel de l’église Sainte Catherine en Neuvice à Liège : Le Martyre de Sainte Catherine, 628 x 338 cm, 1726, Photo ancienne avant l’accident et la restauration
Fig. 1. Théodore-Edmond Plumier, église Sainte Catherine en Neuvice à Liège, Le Martyre de Sainte Catherine, 628 x 338 cm, 1726. Photo avant l’accident et la restauration © Audrey Jeghers.

Dès la fin du mois de mai 2018, nous avons examiné l’œuvre à la demande de l’architecte en charge de la réfection de la façade de l’église. L’affaiblissement de la toile sur le bord inférieur droit lui semblait préoccupante. Il n’était alors question que de déposer le tableau à plat, hors de l’autel afin d’assurer la bonne conservation de l’œuvre. Malheureusement, la situation s’est dégradée très rapidement.

Alors que nous étions en attente du placement d’un échafaudage qui nous permettrait d’avoir accès à la partie supérieure du maître-autel, la toile s’est déchirée sous son propre poids début du mois de juillet 2018. Cette situation critique allait nous obliger à intervenir plus rapidement. Nous avons alors procédé dans un premier temps au sauvetage de la partie déchirée qui reposait sur le tabernacle. Le châssis a ensuite été retiré du maître-autel en novembre de la même année.

 Prise de vue datée du 1er juillet 2018
Fig. 2. Théodore-Edmond Plumier, église Sainte Catherine en Neuvice à Liège, Le Martyre de Sainte Catherine, prise de vue datée du 1er juillet 2018 © Audrey Jeghers.

Cet accident aussi spectaculaire que dramatique nous offrait la possibilité de proposer une intervention de conservation - restauration complète. L’objectif était d’ assurer la pérennité de l’œuvre en intervenant sur le support fortement endommagé mais également d’améliorer l’aspect esthétique du tableau. Il est vrai que la composition avait disparu sous les importantes couches de vernis et d’encrassement qui le recouvraient.

Afin de concrétiser ce projet ambitieux, la fabrique d’église a bénéficié d’une importante subvention du Fonds David Constant de la Fondation Roi Baudouin. La restauration a pris place au sein de l’église Sainte-Catherine entre octobre 2019 et juin 2022.

Visage de Ste Catherine en cours de dévernissage
Fig. 3. Théodore-Edmond Plumier, église Sainte Catherine en Neuvice à Liège, Le Martyre de Sainte Catherine, détail du visage de sainte Catherine en cours de dévernissage © Audrey Jeghers.

La restauration du tableau a permis de redécouvrir le sujet exact du tableau et la richesse des couleurs de la composition. Sous l’encrassement, la date et la signature étaient également devenues illisibles, mais elles sont rapidement réapparues dès le début du nettoyage.

Par sa monumentalité mais aussi par sa qualité plastique, la grande toile du maître-autel de l'église Sainte-Catherine à Liège constitue le chef-d'œuvre de Théodore-Edmond Plumier et c’est à ce titre qu’elle a été classée au titre de Trésor de la Fédération Wallonie-Bruxelles par arrêté du 18 juillet 2019.

L’œuvre illustre le martyre de sainte Catherine d’Alexandrie, sainte qui sera exécutée pour s’être convertie au christianisme. Ne voulant pas renoncer à sa foi, elle sera condamnée par l’empereur Maxence à être écorchée vive sur des roues dentelées. Mais un ange intervint et foudroie les roues qui se brisent en tuant les bourreaux. La sainte apparait majestueuse et imperturbable au centre de chaos.

Photo haute résolution après traitement © Xact Production
Fig. 4. Théodore-Edmond Plumier, église Sainte Catherine en Neuvice à Liège, Le Martyre de Sainte Catherine, Photo haute résolution après traitement © Xact Production.

Actuellement, le tableau n’est malheureusement pas visible car l’intérieur de l’église qui a récemment été classé est en cours d’étude et de restauration. Le maître-autel profite également d’un nettoyage approfondi avant la remise en place du tableau. Nous espérons que ces travaux seront achevés d’ici la fin de l’année.

Audrey Jeghers

Lien : https://cipar.be/2020/03/04/sauvetage-de-la-toile-de-sainte-catherine-en-neuvice-loeuvre-se-devoile/

Une œuvre majeure d’une des plus grandes femmes peintres du XVIIe siècle conservée au Séminaire de Namur : le Mariage mystique de sainte Catherine de Michaelina Wautier

Fig. 1. Michaelina Wautier, Mariage mystique de sainte Catherine, cliché après restauration © IRPA-KIK, Bruxelles, X125205.

Michaelina Wautier

1649

Peinture sur toile

157 x 218 cm

Grand séminaire, Namur

Propriété du Grand Séminaire, Namur

Classé le 23 novembre 2010 – M.B. 8 février 2011

Il y a trente ans à peine, Michaelina Wautier (Mons, ?- Bruxelles, 1689) était presque totalement inconnue et elle n’avait jamais fait l’objet d’aucune étude. C’est dans les toutes dernières années du XXe siècle qu’elle a commencé à retenir l’attention des historiens de l’art et ceux-ci ont bientôt dû convenir que cette Montoise se révélait en fait l’une des plus grandes femmes peintres du XVIIe siècle ! En ce temps où les femmes peintres étaient reléguées dans des genres dits mineurs, Michaelina a produit tant des grandes toiles mythologiques et religieuses que des scènes de genre, des fleurs ou des portraits, ce qui est très inhabituel. C’est manifestement en raison de sa condition de femme que l’historiographie a scandaleusement oublié cette artiste de premier plan !

Fig. 2. Michaelina Wautier, Mariage mystique de sainte Catherine. Détail © IRPA-KIK, Bruxelles, X125207.

Elle représente l’une des personnalités artistiques les plus surprenantes, et les moins connues, des Pays-Bas au XVIIe siècle. Elle ne s'est signalée à nous qu'à travers une petite trentaine de tableaux signés ou documentés. Sa notoriété grandissante a conduit à de multiples attributions sur des bases stylistiques, mais le bon grain doit encore être séparé de l’ivraie. Curieusement, sa production documentée se situe seulement entre 1643 et 1659, alors qu’elle a vécu environ 75 ans.

Hors de ses tableaux, on sait peu de choses d’elle ; sa date de naissance exacte n’est, par exemple, pas connue, contrairement à ce que l’on avait cru. On sait qu’elle est issue d’une famille de la petite noblesse montoise, qu’elle avait des nombreux frères et sœurs. Son frère Charles (1609-1703) a dû jouer un rôle important dans sa formation car il est également devenu peintre ; on commence aussi à redécouvrir son œuvre. Charles et Michaelina sont toujours restés très proches. Étant demeurés tous deux célibataires, ils partagèrent le même domicile à Bruxelles et le même atelier. Ils furent tous deux enterrés dans l’église de la Chapelle. C'étaient des personnalités suffisamment en vue pour se voir commander des tableaux par l'archiduc Léopold-Guillaume de Habsbourg, gouverneur des Pays-Bas et l’un des plus grands collectionneurs de son temps. La question de leur collaboration est l’un des sujets qui interpellent le plus les historiens de l’art qui se penchent aujourd’hui sur leur production.

Michaelina Wautier, Mariage mystique de sainte Catherine. Détail © IRPA-KIK, Bruxelles, X125205.
Fig. 3. Michaelina Wautier, Mariage mystique de sainte Catherine. Détail © IRPA-KIK, Bruxelles, X125206.

Le saisissant Mariage mystique de sainte Catherine (157 x 218 cm) est l’une des meilleures réalisations de Michaelina dans le grand genre. On y voit sainte Catherine d’Alexandrie agenouillée, aisément reconnaissable à la roue dentelée à ses côtés, et portant la main vers l’Enfant Jésus assis sur les genoux d’une mère au regard compatissant. Marie est assise sur une tablette de pierre devant saint Joseph. Au second plan au centre se découvre sainte Barbe, à moins qu’il ne s’agisse de sainte Agnès ; elle tient la palme symbole de son martyre. À droite apparaît le petit saint Jean, accompagné d’un agneau, son attribut autant que celui de sainte Agnès. C’est l’une des représentations les plus originales que l’on connaisse de ce thème au XVIIe siècle.

La signature et la date de 1649 que porte ce beau tableau ont été oubliées jusqu’en 2001. Une de ses principales spécificités, c'est l'extrême caractérisation des personnages : on devine des portraits dûment étudiés. Le visage affable de la noble dame qui a servi de modèle à la Vierge apparaît comme un contrepoint à la représentation dynamique de saint Joseph, rejeté dans l'ombre. Il se dégage de cette dernière figure une exceptionnelle puissance expressive qu'accentuent les contrastes lumineux ; c'est un saint Joseph bien éloigné de la typologie traditionnellement neutre et austère du personnage. Il faut peut-être voir dans les figures des portraits de notabilités locales, éventuellement de la famille de Croÿ. L’origine de cette toile est malheureusement inconnue.

Ce trésor de la Fédération Wallonie-Bruxelles a retrouvé sa vivacité grâce à sa restauration à l’IRPA en 2017-2018. Il devrait être bientôt proposé à l’admiration d’un large public international, dans le cadre d’une grande exposition sur Michaelina Wautier qui se tiendra au Kunsthistorisches Museum de Vienne à l’automne 2025, puis à la Royal Academy de Londres dans les premiers mois de 2026.

Pierre-Yves Kairis

Vice-président de l’Institut archéologique liégeois

Bibliographie

KAIRIS P.-Y., « Le portrait dans le Namurois au XVIIe siècle » dans TOUSSAINT J. (éd.), Portrait en Namurois, Namur, Province de Namur, 2002, pp. 39-41.

KAIRIS P.-Y., Mariage mystique de sainte Catherine en présence de sainte Barbe et du petit saint Jean, dans JAFFRE G. et MARCHANT C. (sous la coord.), Trésors classés en Fédération Wallonie-Bruxelles, Protection du Patrimoine culturel, vol. 1, Stavelot, 2015, p. 229.

VAN DER STIGHELEN K., « Prima inter pares’. Over de voorkeur van aartdhertog Leopold-Wilhelm voor Michaelina Woutiers (ca 1620-na 1682) », dans VLIEGHE H. et VAN DER STIGHELEN K., Actes du colloque Sponsors of the Past. Flemish Art and Patronage 1550-1700, Turnhout, Brepols, 2005, pp. 107-108.

VAN DER STIGHELEN K. (dir.), Catalogue de l’exposition Michaelina Wautier. 1604-1689. Gloryfying a Forgotten Talent, Anvers, 2018, p. 200-203.

Exposition - Soigner notre patrimoine

La collégiale de Huy accueille cet été une nouvelle exposition, intitulée "Soigner notre patrimoine", l'événement émane d'un partenariat inédit entre la fabrique d'église, le Trésor de la collégiale, l'école Nationale supérieure des Arts visuels de La Cambre (Bruxelles) et l'école Supérieure des Arts Saint-Luc (Liège).

Si vous êtes de passage à Huy, n'hésitez pas à la découvrir, elle y est visible jusqu'au 29 septembre 2024.
Maura Moriaux

Programme des prochaines Journées du Patrimoine est actuellement consultable en ligne

L'AWaP  le plaisir de vous annoncer que le programme des prochaines Journées du Patrimoine est actuellement consultable en ligne via leur site interactif AWaP (journeesdupatrimoine.be) ou téléchargeable en PDF brochure (journeesdupatrimoine.be).

(suite…)

CIPAR - Centre Interdiocésain du Patrimoine et des Arts Religieux