CIPAR

Une opération de sauvetage d’œuvres d’art à l’église de Fraipont

Publié le 08/10/2021

Lors des inondations, l’église Saint-Gilles (commune de Trooz) a probablement été une des églises les plus touchées. Pour sauver le patrimoine mobilier, le CIPAR, l'évêché de Liège, l’IRPA et le Bouclier Bleu se sont mobilisés pour mener une opération d’envergure avec pour objectifs d’évacuer au plus vite les œuvres en lieu sûr, ainsi que d’assainir autant que possible les autres biens mobiliers. 

Des œuvres menacées 

En effet, localisée en bord de Vesdre, une grande quantité d’eau s’est engouffrée dans l’édifice, atteignant une hauteur maximale d’un 1,80m. Par manque de ressources in situ, ni l’église ni les œuvres n’avaient pu bénéficier d’un assainissement dans les deux mois qui ont suivi le sinistre, favorisant le développement à grande échelle de moisissures.

Fig. 1, 2, 3. Moisissures sur les textiles, les meubles, les murs. Photos de l'auteur.


Plusieurs œuvres produites entre le XVe siècle et le XIXe siècle y étaient abritées et au vu du risque sanitaire, leur conservation était menacée. 

En effet, exposées à un taux d’humidité relative élevé, les sculptures, le mobilier en bois et les textiles conservés dans la sacristie étaient recouverts et se trouvaient dans un état de conservation problématique. 

Un travail préparatoire nécessaire 

Le 24 septembre dernier, plusieurs membres du CIPAR, de l’IRPA et du Bouclier Bleu ont rassemblé leurs efforts pour mener cette vaste opération. Celle-ci, destinée à sauver en priorité les œuvres rescapées du sinistre, a dû être préparée avec méthode. Voici les étapes qui avaient été entreprises en amont :  

  • Lancement d’un appel pour rassembler des restaurateurs de différentes spécialisations (sculptures en bois, mobilier en bois, papier, textiles, peintures) ;
  • Identification d’un local sain et sécurisé dans lequel les œuvres peuvent être conservées et traitées à terme ;
  • Recherche d’un mode de transport sécurisé jusqu’au lieu de dépôt ;
  • Préparation et rassemblement de matériel adéquat (masques FFP3, produits pour consolider les polychromies, matériel d’emballage, etc.)
  • Analyse de l’inventaire pour identifier quelles œuvres doivent être évacuées en priorité, justification de ces choix. 

Fig. 4, 5. Les restaurateurs au travail. Photos de l'auteur.

Plan d’action mis en œuvre 

Une fois sur place, les tâches ont été rapidement réparties entre les différents membres présents. Tandis que le CIPAR s’est chargé de l’établissement d’un inventaire rapide, de l’évaluation des urgences en matière de préservation des textiles, et de la documentation de toutes les étapes entreprises, les restaurateurs se sont attelés au sauvetage et au traitement des biens mobiliers en fonction de leur spécialisation respective. 

  • Assainissement et emballage des sculptures en bois

Les sculptures ont toutes été attentivement examinées. Afin de les préparer pour le transport et d’éviter des dégradations supplémentaires, les restaurateurs ont procédé à la pose de facings. Cette technique de conservation consiste à fixer la polychromie, par l’application d'une feuille de protection en papier japon sur la surface de l’œuvre, à l’aide de colle animale. . Ensuite, les sculptures ont été emballées et fixées soigneusement à un support en vue de leur transport jusqu’au lieu de dépôt. 

 

Fig. 6, 7. Application de la colle animale pour le facings et du papier japon. Photos de l'auteur.

  • Assainissement des textiles 

Des textiles avaient baigné durant plus de deux mois dans l’humidité et dans la boue. Certains ensembles ont heureusement pu être sauvés. Étant donné qu’ils étaient encore humides, les restaurateurs ont nettoyé délicatement les pièces à l’eau claire. Elles ont ensuite été épongées à l’aide de papier absorbant, avant d’être replacées sur des structures de séchage temporaire, dans la nef. 

Fig. 8, 9, 10. Textiles qui ont pris l'eau dans les tiroirs. Photos de l'auteur.

  • Descente d’une toile

La toile peinte, conservée dans le baptistère, a été descendue par les restaurateurs pour être évacuée au plus vite. Étant donné la fragilité de la toile, elle a dû être délicatement emballée à l’aide de papier bulle. 

  • Découverte et mise à plat de documents d’archives

Des registres paroissiaux ont été retrouvés dans un recoin du baptistère. Après les avoir sortis, ils ont été disposés sur des tables placées dans la nef de l’église. Les archives atteintes par les micro-organismes (et conservées initialement dans des boîtes en carton) ou celles qui étaient très humides ont été sorties de leur boîte, afin d’être déposées en liasses (petits tas) sur un papier absorbant fin déroulé sur les tables.

Fig. 11, 12, 13. Les archives mises à sécher. Photos de l'auteur.

  • Élévation du gros mobilier (confessionnaux, bancs, etc.)

Les bancs et les confessionnaux ont été surélevés de manière à ventiler les bases, qui étaient couvertes de moisissures. 

En fin de journée, les œuvres ont pu être évacuées de l’église, en lieu sûr, dans un dépôt mis à disposition par le Trésor de la Cathédrale de Liège

Maura Moriaux

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