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Les vitraux du chœur de l’église Saint-Géry à Marche-lez-Ecaussines

Publié le 03/05/2022

En 1802, Pierre Trine et son fils, du Roeulx, réparent les « vitres » de l’église. En 1931, l’abbé Gailly, acheva de restaurer les fenêtres endommagées en les insérant dans des meneaux dessinant des arabesques, mais les vitres restaient quelconques. Grâce à la générosité des curés de Marche et des paroissiens, des vitraux ornent depuis 1945 le chœur de l’église, classé par la Commission Royal des Monuments et Site. Ces vitraux d’art sont sortis des ateliers de l’artiste et peintre-verrier Crickx, de Bruxelles. Voyons ces quatre vitraux en détail (de gauche à droite).

L’idée maîtresse qui a résidé au choix des « mystères » religieux est très simple : mettre en valeur les grands évènements de la vie du Christ, sa naissance (adoration des bergers), sa mort (la crucifixion), sa résurrection et enfin, la Pentecôte qui donne à l’Eglise son acte de naissance.

Ainsi l’artiste, tout en donnant à ses vitraux une fonction décorative, a su intelligemment proposer une autre fonction : être pour les simples comme pour les savants un  grand catéchisme en image illustrant de façon permanente les Vérités de la Foi.

Les vitraux du chœur de l'église. Photo © Déborah Lo Mauro
Les vitraux du chœur de l'église. Photo © Déborah Lo Mauro

L’Adoration des bergers

Au centre de la verrière, la Vierge-Mère se détache, tenant sur ses genoux l’Enfant-Dieu.

Marie apparait la chevelure couverte d’un voile et le corps drapé dans un ample et riche manteau, comme on peut le voir sur certains tableaux de Primitifs flamands. Même dignité, même recueillement, même sérénité. De sa main gauche, la Vierge tient délicatement le petit pied de l’Enfant Jésus. Peut-être s’agit-il ici d’une réminiscence du geste que pose précisément la Vierge appelée communément Notre-Dame de Marche, cette statue, restaurée quelque temps plus tôt.

L’Enfant Jésus lève la main droite, signe de bénédiction, et regarde affectueusement le berger à la houlette qui se tient debout à sa hauteur. Le berger lui apparaît comme en extase ; le doigt levé, il semble attirer l’attention sur l’étoile mystérieuse et les anges musiciens nichés dans les meneaux. 

Quant à Saint-Joseph auréolé, il invite les bergers à offrir leurs hommages à l’Enfant-Dieu. A l’avant-plan, agenouillés, deux autres bergers, d’âges apparemment très différents, manifestent leur admiration et joignent les mains. Moutons et agneaux jettent une note pittoresque dans ce joli tableau où l’on remarque aussi, bien en vue, un magnifique bouvier belge debout et les oreilles dressées, prêt à défendre tous ceux qui sont présents contre toute intrusion inconsidérée. Tout en haut de la verrière, au-dessus des deux anges, brille l’étoile de Bethléem. L’équilibre des figures, autant que le jeu des lignes sont particulièrement à signaler. Sous cette belle verrière, se lit en caractères gothiques « Don de Joseph Jacques, berger ».

L'Adoration des Bergers. Photo © Déborah Lo Mauro
L'Adoration des Bergers. Photo © Déborah Lo Mauro

La Crucifixion

Au centre de la composition, comme pour prolonger l’autel, se dresse la croix au sommet du calvaire. Le Christ y apparaît livide, il vient de rendre l’âme. Son ton blâfard est encore accentué par le fond du tableau, en bleu outremer, et par la robe rouge et le manteau vert de la Vierge Marie, stoïquement debout à l’avant-plan, la tête recouverte d’un voile. Elle y apparaît vraiment comme la Mère des douleurs. 

Près d’elle, le « disciple que Jésus aimait », saint Jean en prières. Comme Marie, il regarde Jésus, son maître, et son front plissé marque sa douleur mais son regard manifeste tout autant l’amour et la confiance.

Marie-Madeleine, elle, est effondrée au pied de la croix et la tête inclinée, elle semble chercher encore une fois le dernier regard du Christ mourant. Dans un geste de tendresse et d’appel pathétique, elle lève les bras vers Jésus.

Le soldat Longin, qui perça de sa lance le cœur du Christ pour vérifier sa mort, est là aussi. Touché par la grâce, il vient de se convertir et semble attester la divinité de celui qu’il a transpercé.

A droite, à l'avant-plan, dans un opulent costume, se pavane un riche Pharisien. On devine en lui l’un de ceux qui ricanent et insultent le crucifié, fort de sa vérité puisée dans le livre saint qu’il tient en main, La Loi de Moïse.

Fidèle à la tradition, l’artiste a représenté au sommet de la croix le soleil et la lune. Le soleil représente le Nouveau Testament, l’Eglise qui représente le jour, la lumière nouvelle de la révélation, tandis que la lune représente l’Ancien Testament, la synagogue et la nuit avec ses ténèbres et ses incertitudes.

La légende, en-dessous du vitrail, rappelle qu’il s’agit d’un don de tous les paroissiens de Marche, à leur église.

La Crucifixion. Photo © Déborah Lo Mauro
La Crucifixion. Photo © Déborah Lo Mauro

La Résurrection

Dans la gloire rayonnante d’un jaune éclatant, se détache, sur fond bleu, le Christ en gloire esquisse un geste de bénédiction tandis que de la main gauche, il brandit la bannière blanche de la croix triomphale.

Aux pieds de Jésus, dans l’ombre, des gardes, chargés par Pilate de surveiller le cadavre, sont renversés par la soudaineté et l’éclat du prodige. Le soldat de gauche, les yeux hagards, les traits tirés et convulsés par l’effroi, esquisse un rictus. L’autre soldat, tout aussi effrayé, est tombé à genoux et, ne pouvant supporter la vue de l’apparition, lève son bouclier et s’en cache la figure.

La composition générale est mouvementée et les lignes heurtées, faisant contraste avec la sérénité du Christ, sortant impassiblement du tombeau. Dans le haut du vitrail, l’artiste donne deux représentations symboliques de la résurrection que l’on trouve souvent dans l’iconographie du Moyen Âge : Jonas, le prophète, sortant vivant de la baleine qui l’avait englouti et l’animal fabuleux, le phénix qui renaît de ses cendres.

Comme l’indique la légende, ce vitrail est un don de la famille Ghislain-Leloup.

La Résurrection. Photo © Déborah Lo Mauro
La Résurrection. Photo © Déborah Lo Mauro

La Pentecôte

Respectant l’iconographie ancienne, l’artiste représente la Vierge Marie au milieu des apôtres. Sous l’aspect d’une colombe, l’Esprit-Saint apparaît répandant sur chacun des apôtres ses grâces et ses dons sous la forme d’une langue de feu.

La Vierge, en majesté, y apparaît rayonnante et souriante, songeant à la naissance de cette Eglise qui va continuer l’œuvre de son fils. Les apôtres, tout aussi rayonnants, y apparaissent comme de nouveaux prêtres le jour de leur ordination.

Le sommet du vitrail est occupé par de nombreux symboles empruntés à l’Ancien Testament. Le premier dessin est consacré à la Loi judaïque : au centre d’un buisson ardent figurent les tables de La Loi, données à Moïse sur le Mont Sinaï par Dieu lui-même.

La Pentecôte. Photo © Déborah Lo Mauro
La Pentecôte. Photo © Déborah Lo Mauro

Le second dessin rappelle le souvenir des sacrifices sanglants au Temple de Jérusalem. L’agneau immolé et brûlé sur l’autel des sacrifices préfigure ici l’Offrande que fait le Christ de sa vie au Calvaire, sacrifice renouvelé chaque jour à la messe.

Ce vitrail, de composition plus classique et plus ecclésial par son sujet, fut offert par des prêtres originaires de Marche-lez-Ecaussines : Emile Benard, Arnould Bottemanne et Jules Gailly, curé de la paroisse de Marche et promoteur de cette restauration du chœur. 

Abbé Léon Jous

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