Valoriser, sécuriser, rendre accessible : "les trésors des cathédrales", un ouvrage clé
Les Trésors des Cathédrales de France et de bien d’autres pays font l’objet de soins particuliers, car ils sont une véritable mémoire de l’histoire politique et sociale, mais aussi artistique et religieuse de nos régions. Sur les 87 cathédrales de l’Hexagone et des autres territoires français, 46 ont un trésor ouvert au public. Au total, la France compte 265 trésors d’églises, cathédrales comprises. L’ouvrage intitulé Trésors des cathédrales explorent dans toutes leurs spécificités ces ensembles d’œuvres si particuliers, en voici un compte-rendu éclairé.
Dans la mesure du possible, les œuvres sont gardées sur place : « Si bien des objets ont gagné les musées, certains reviennent au trésor… et toutes les études insistent sur l’intérêt de la conservation in situ ». De plus, il arrive que l’architecture (« l’infiniment grand ») et l’orfèvrerie (« l’infiniment petit ») s’accordent quant au style. C’est le cas par exemple à l’époque gothique.
Des Témoins de l'histoire
Les trésors d’orfèvrerie et autres, mais aussi les chartes et les nombreux manuscrits sont d’abord des témoins de l’histoire. On comprend qu’ils aient été placés dans des armoires sécurisées ou des chambres fortes, à l’abri du regard des voleurs. Ils contiennent des pièces relevant de l’ornamentum (tapisseries, parements d’autel, etc.) et du ministerium (vases sacrés, croix, habits et livres liturgiques, reliquaires, chandeliers, encensoirs). Au cours des temps, ces trésors ont parfois été pillés ou massacrés ou passés au feu, comme lors des Guerres de religion ou la Révolution française. Qu’on pense au trésor d’Auxerre, saccagé par les Anglais en 1359 et pillé par les Huguenots en 1567.
Après le Concordat, les trésors des cathédrales françaises ont été réorganisés et recréés, grâce à des dons de pièces anciennes et à de nouvelles commandes. Ils font partie aujourd’hui des Monuments Historiques et sortent de leur relative clandestinité pour être présentés dans des expositions de prestige où ils deviennent en quelque sorte les « ambassadeurs » de leur pays d’origine.
Les Matières
Les objets d’orfèvrerie sont souvent réalisés dans des matières précieuses, l’or et l’argent, et même l’étain, le cuivre ou le laiton. Ils ont connu bien des épreuves comme les dons et les ventes, la destruction et la fonte pour des raisons économiques, car ils constituaient des réserves monétaires en puissance. Qu’on pense à la fonte d’orfèvreries sous Louis XIV pour soutenir les guerres de la France. Après le Concile de Vatican II, les œuvres d’art ont pu souffrir de la négligence ou de l’ignorance des responsables et être aliénées sans discernement suffisant.
Les textiles, à la fois précieux et fragiles, ont souffert de différentes manières au cours des temps : usure, destruction, vente, échange. C’est le cas de certaines tapisseries ou tentures, et de nombreux parements d’autel. Les survivants sont d’autant plus précieux, comme les tapisseries et broderies ou les vêtements liturgiques gardés dans des chapiers, parfois trouvés dans les tombes d’évêques ou de chanoines. Ces tissus peuvent être de véritables reliques, comme le Suaire de Carcassonne et les enveloppes mortuaires du Christ, ou les vêtements de personnages canonisés, comme ceux de Thomas Becquet à Sens.
Le Florilège
L’ouvrage s’achève avec un Florilège organisé par ordre alphabétique, comportant une bibliographie essentielle. Il s’agit d’une présentation documentée et illustrée de pièces majeures appartenant à une trentaine de trésors s’étendant sur plus d’un millénaire. On y trouve reproduites diverses œuvres, peintures, sculptures, orfèvreries, châsses et reliquaires, etc. Elles appartiennent à des lieux majeurs tels que Albi, Amiens, Autun, Chartres, Lyon, Metz, Orléans, Paris (Notre-Dame et Saint-Denis), Poitiers, Troyes et Reims, pour ne citer que les plus importants.
Cette dernière partie de l’ouvrage rappelle à tous les responsables d’œuvres religieuses, modestes ou de prestige, l’importance des Inventaires, réalisés selon les standards d’aujourd’hui. Ceux-ci favorisent un sain entretien et une saine gestion des œuvres pour que les générations suivantes ne deviennent pas « aphasiques » de leur propre passé…
Référence bibliographique : Judith KAGAN et Marie-Anne SIRE (éd.), Trésors des cathédrales, Paris, Centre des Monuments Nationaux, Editions du Patrimoine, 2018, 319 p.
André Haquin