Église du Nom de Jésus à Chanxhe : un coffre-fort avec des archives et des pièces d’orfèvrerie
L’église du Nom de Jésus à Chanxhe a été très inondée par les eaux de l’Ourthe située juste à côté, malgré les travaux de surélevement de 1973 pour parer aux débordements de la rivière. Bâtie en 1775, elle a été agrandie en 1926. La fabrique d’église, composée de quatre membres, a été personnellement très touchée. Par conséquent, ils n’ont pas su aller directement à l’église. De plus, le parking devant l’église a été utilisé par la commune pendant quelques jours pour stocker les déchets, ce qui rendait impossible l’accès au bâtiment.
Dès sa première visite, la fabrique d’église a été confrontée à beaucoup de dégâts de mobilier et de l’édifice lui-même. L’eau est montée jusqu’à 1,70 m à l’intérieur. Le plâtre des murs intérieurs, très humide, s’effrite à certains endroits et tombe sur le sol. Les murs extérieurs encore gorgés d’eau présentent une ligne très nette à 2m de haut, témoignant de la montée de la crue. Le salpêtre apparaît déjà très nettement.
La moisissure s’était déjà développée pendant les deux semaines sans aération. Pour ne rien arranger, la citerne à mazout remplie avant le sinistre s’est totalement renversée et vidée dans la salle de la chaudière, sur le parking et un peu dans l’église. La porte et les fenêtres de la sacristie restent ouvertes pour la circulation de l’air. Celles-ci n’ont pas été choisies au hasard par la fabrique : elles sont toutes munies de barreaux métalliques.
Le problème compliqué de la boue
L’eau a amené avec elle de la boue qui n’arrive pas à partir définitivement malgré les différents nettoyages. Le sol carrelé est encore très sale. Les meubles en bois et en pierre en sont également encore couverts.
La garde-robe de la statue de la Vierge conservée dans la sacristie a été retrouvée complètement inondée. Elle a été séchée au domicile d’un des fabriciens. Les différentes tenues sont pendues chacune sur un cintre bien espacées les unes des autres. Aujourd’hui ils sont secs mais couverts d’une couche de boue. Malheureusement, dans l’urgence, il n’a pas été possible de faire sécher les robes à plat (Verviers).
Les objets du coffre-fort : le papier et le cuir
L’église a un coffre-fort dans lequel étaient conservés plusieurs documents d’archives. Sans surprise, le papier des archives paroissiales et le cuir des parchemins ont été très sensibles à l’humidité excessive. Trois parchemins ont été mis en sécurité à l’évêché par Christian Dury, l’archiviste de l’évêché de Liège.
Quels sont les dégâts causés par l’eau ?
- L’encre peut s’écouler et pâlir, le papier peut enfler et se déformer ;
- Le papier humide constitue un terrain propice au développement rapide de micro-organismes, comme les moisissures.
- Le papier humide est beaucoup plus lourd, ce qui peut avoir un impact sur les étagères le supportant.
Que faire en cas de dégâts?
- Faire évacuer le plus vite possible l’eau stagnante ;
- Aérer et déshumidifier la pièce afin d’empêcher la formation de moisissures ;
- Stabiliser les étagères et si nécessaire, enlever un ou plusieurs documents de chaque planche afin d’éviter que les rayonnages ne s’effondrent sous le poids du papier gorgé d’eau ;
- Évacuer le plus rapidement possible le matériel encore sec ;
- Prévoir un local de conditionnement propre et sec.
- De plus petites quantités de documents humides mais non trempés, atteints par de l’eau propre, peuvent être séchées à l’air, dans une pièce fraîche avec un faible degré d’humidité et une bonne circulation de l’air. Il faut étaler les documents, insérer entre les pages du papier buvard incolore renouvelé régulièrement. Cette méthode est simple mais laborieuse et demande beaucoup d’espace.
- Les documents qui sont complètement trempés et atteints par de l’eau sale (comme les eaux d’égouts) doivent être congelés endéans les 48 heures. La congélation stabilise les documents et empêche les déformations physiques et les contaminations biologiques.
- Ne jamais essayer d’ouvrir ou de fermer des volumes trempés dont les pages collent ensemble.
- Attention, ne pas utiliser de sèche-cheveux, ni du papier journal comme papier buvard.
Les objets du coffre-fort : l’orfèvrerie
Le coffre contenait aussi de la vaisselle liturgique. Les pièces d’orfèvrerie ont de ce fait toutes été mises à l’abri dans un autre endroit. Si la solution de l’évacuation est privilégiée, il faut toujours bien veiller à un rangement des pièces qui répond bien aux spécificité de ce type de patrimoine : jamais les empiler, lieu sécurisé et environnement sain. Rappelons ici l’importance de bien laisser une trace écrite des déplacements des objets, encore plus particulièrement les pièces de vaisselle liturgique.
Bien que beaucoup moins spectaculaire que des moisissures sur du papier ou du bois, c’est un tort de penser que le métal est à l’abri des dégâts causés par l’eau car l’humidité peut, en réalité, accélérer la corrosion. De plus, l’orfèvrerie est souvent conservée dans des écrins en bois et en tissu, des coffrets de carton et tissu ou des petits sacs. Ceux-ci retiennent l’humidité et parfois se délitent une fois qu’on les soulève pour les déplacer. Il faut toujours bien les ouvrir, et cela le plus rapidement possible, et laisser en dehors la pièce d’orfèvrerie.
Vu le poids, les dimensions et la fragilité des pièces, les œuvres doivent toujours être portées à deux mains, en en mettant une en dessous. Il ne faut pas oublier de manipuler l’orfèvrerie avec des gants en coton ou en latex.
Pour le nettoyage de ces pièces, il ne faut jamais utiliser des produits acides ou vendus dans les grandes surfaces. Faites appel à un restaurateur spécialisé dans l’orfèvrerie. Seul un chiffon doux sec peut être utilisé avec des gestes légers pour enlever la poussière.
Vinciane Groessens