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Propriété et jouissance de la châsse de sainte Begge d’Andenne

Publié le 03/05/2021
La presse a relayé la volonté du Bourgmestre d’Andenne de récupérer la propriété de la châsse-reliquaire de sainte Begge, fondatrice d’Andenne et de pouvoir l’exposer dans un musée qu’il voudrait construire à cette fin. Nous voulons exposer ici la position de la fabrique d’église et de l’évêché de Namur qui encadre cette dernière dans ses démêlés avec la commune.

1. Propriété de la châsse

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Collégiale Sainte-Begge à Andenne. Photo Wikipedia.

Les biens d’église, c’est-à-dire les bâtiments de culte et leur contenu, ont été nationalisés chez nous en 1796 lorsque les Français révolutionnaires ont envahi la Belgique. Ces biens ont été donnés aux communes. Ils sont restés propriété communale après l’indépendance de la Belgique.

Les historiens andennais expliquent que dès 1787, les chanoinesses d’Andenne ont quitté la ville et trouvé refuge à Namur. Elles y ont emporté leur châsse qui ne se trouvait donc pas dans l’église lors de sa nationalisation. La châsse a été restituée et confiée à la collégiale vers 1820, après l’établissement du concordat entre Napoléon et le pape Pie VI, concordat qui a été repris par les différents régimes qui ont suivi la chute de l’empire.
De cette histoire, il découle que la châsse n’a pas été nationalisée. Restituée à la collégiale, elle est donc devenue propriété de fabrique.

2. Jouissance d’un bien affecté au culte

Ce point d’histoire et les conséquences de la propriété d’un bien conservé dans une église sont toutefois de peu d’importance en ce qui concerne son usage.
Se fondant sur la constitution belge, la loi prévoit que des bâtiments ou des objets, quel que soit leur propriétaire, puissent être affectés au culte. Cela veut dire qu’ils sont mis à disposition du culte catholique qui en devient le seul usager.
Aujourd’hui encore, la châsse d’Andenne est un objet de culte avant d’être une œuvre d’art. Elle renferme les reliques de sainte Begge dont le culte est encore vivace au bord de la Meuse. C’est la fabrique d’église qui en assure l’usage, la conservation et l’entretien. Et cela, que les biens soient propriété de la commune, de la fabrique, ou même d’une tierce personne. Dans cette affectation, le propriétaire n’a aucun droit à faire valoir pour une utilisation de ce patrimoine, fut-il un trésor de grande valeur historique ou artistique.
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Châsse abritant les reliques de Sainte-Begge, Photo © KIK-IRPA, Bruxelles.

3. Un patrimoine communautaire

Le bourgmestre d’Andenne justifie sa position en prétendant que la fabrique d’église séquestre au seul profit de quelques chrétiens pratiquants un patrimoine qui appartient à la collectivité andennaise tout entière et fait partie de la mémoire collective.
Nous contestons cette notion d’usurpation. La fabrique d’église et les autorités diocésaines sont conscientes que le trésor de la collégiale est bien un patrimoine relevant de l’ensemble de la communauté locale et fait partie intégrante de l’histoire de la cité, tout comme la collégiale elle-même qui fait partie du patrimoine historique andennais. La collégiale est ouverte en permanence et n’est pas un bâtiment à l’usage exclusif de quelques individus possessifs. L’affectation au culte n’est en rien restrictive, elle permet également une valorisation culturelle et patrimoniale à l’attention d’une communauté entière avec sa dimension touristique.
La valeur historique et même sentimentale du trésor ne trouvera toutefois sa pleine expression que s’il est conservé au sein de l’édifice qui l’abrite depuis plusieurs siècles et qui lui confère tout son sens.

4. Des propositions échangées entre la fabrique et la commune

Les propos du bourgmestre d’Andenne surprennent d’autant plus que des réunions et échanges ont été nombreux à propos de la valorisation du trésor de la collégiale. A la demande de la ville, le directeur du musée communal Le phare, a rédigé un projet d’exposition de la châsse dans la collégiale. La fabrique et les représentants de l’évêché souscrivaient à ces idées. Les déclarations actuelles du bourgmestre arrivent à contre-courant des résultats d’une étude commandée par lui-même.

5. De l’obligatoire connivence entre commune et fabrique

Le statut juridique du patrimoine religieux, son affectation au culte, la responsabilité de conservation et d’entretien de la fabrique et l’obligation de financement de la commune rendent obligatoire la connivence entre les différents partenaires pour une gestion responsable du patrimoine religieux. Aucun acteur ne peut faire l’un sans l’autre. Dans ce contexte un recours aux tribunaux va évidemment faire pire que bien.
D’un point de vue gestion communale, le bourgmestre va engager des frais de justice à charge des finances communales. La fabrique devra prendre un avocat dont les honoraires seront également, via le compte de fabrique, soldés par la commune. Tout cela relève de l’absurde.
En conclusion, les autorités diocésaines et les membres de la fabrique d’église réitèrent leur volonté de donner plus d’éclat à un patrimoine cultuel dont elles sont conscientes de l’importance historique et artistique. Elles sont disposées à discuter de nombreux projets avec les autorités communales, tout en respectant une affectation cultuelle garantie par la loi et la constitution belge. "
Photo internet Châsse Sainte Begge d'Andenne.
Fabrique d’église Sainte Begge d’Andenne
Évêché de Namur
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