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Deux chefs-d’œuvre du diocèse de Namur exposés à Vienne !

Publié le 30/09/2025

Deux tableaux du diocèse de Namur sont arrivés mardi dernier aux cimaises du Kunsthistorisches Museum de Vienne, un des plus prestigieux musées d’art au monde. Il s’agit du Mariage mystique de sainte Catherine, peint par Michaelina Wautier en 1649, et du Miracle de saint Eloi, peint par son frère Charles Wautier en 1659. Provenant respectivement du Séminaire de Namur et de l’église Saint-Servais de Gimnée (Doische), ils sont tous deux classés au titre de Trésor de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Ils sont à voir à Vienne jusque fin février, dans une grande exposition intitulée sobrement Michaelina Wautier, peintre.

Pour le Séminaire et pour l’église de Gimnée, un tel prêt est bien sûr un événement. Pour la fabrique d’église de Gimnée plus particulièrement, l’exposition marque l’aboutissement d’un projet de revalorisation complète du tableau.  En mars 2024, le tableau est demandé en prêt par le musée de Vienne. Le tableau est restauré par Laetitia Golenvaux, grâce à l’obtention d’un soutien financier du Fonds Baillet-Latour. En parallèle, un dossier de classement est ouvert, et le tableau est classé Trésor en 2025. Quand on travaille ensemble, on est plus fort : le classement, la restauration et le prêt du tableau de Gimnée ont été permis par une remarquable collaboration entre experts en histoire de l’art, conservateurs de musées, administration du patrimoine de la communauté française, restaurateurs, service diocésain du patrimoine et fabrique d’église.

De Doische à Vienne : le transport d’œuvres classées

Le transport des œuvres classées ne s’improvise évidemment pas, et fait l’objet de procédures complexes…. et onéreuses !  L’organisateur de l’exposition commence par envoyer une demande de prêt détaillée et motivée au détenteur de l’œuvre. Celui-ci peut ainsi prendre position. S’il est d’accord avec le prêt, il doit en demander l’autorisation à la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui aura donc le dernier mot. L’administration et la commission du patrimoine culturel de la Fédération Wallonie-Bruxelles étudient la demande et prennent position : refus ou acceptation, avec ou sans condition. La Fédération Wallonie-Bruxelles peut exiger pour le prêt diverses conditions particulières de transport, d’exposition, de sécurité, etc. Finalement, c’est la ministre de la culture qui octroiera l’autorisation définitive. Si l’œuvre sort de l’Union Européenne, d’autres procédures seront à respecter (c’est le cas du tableau du Séminaire, qui prendra la route de Londres, après son séjour à Vienne).

 Si le prêt est accepté par la Fédération Wallonie-Bruxelles, il reste encore à organiser le transport en pratique : contrat de prêt, assurance, emballage, expédition, manutention, installation… Pour un tel transport, l’intervention de sociétés spécialisées en transport d’œuvres d’art est nécessaire. Organisées en vaste réseau logistique, ces sociétés collaborent entre elles, ce qui permet d’assurer le transport des œuvres d’art d’un bout à l’autre de l’Europe dans de bonnes conditions. Toutes les étapes ont été planifiées et validées à l’avance par le prêteur et la Fédération Wallonie-Bruxelles : mode de transport ? étapes intermédiaires ou pauses sur la route ? transport exclusif ou avec d’autres œuvres ? Ce sont aussi ces sociétés qui confectionnent les protections nécessaires au transport : de grandes caisses en bois fabriquées sur mesure, doublées de mousse pour assurer l’isolation des œuvres.

À l’arrivée au musée, les œuvres sont laissées dans leur caisse au moins 24h pour se remettre de leur voyage et s’acclimater. Un représentant du prêteur est présent pour le déballage et l’installation dans les salles. Au préalable, avec les commissaires de l’exposition, il vérifie que les œuvres sont arrivées en bon état et sont prêtes pour être admirées par des milliers de visiteurs !

Michaelina Wautier, peintre

Avec cette grande exposition, le Kunsthistorisches Museum de Vienne célèbre Michaelina Wautier, peintre baroque du 17e siècle qui a été complètement redécouverte depuis les années 2000. Après avoir été oubliée par l’histoire de l’art, elle est aujourd’hui considérée comme une des plus importantes figures parmi les peintres de son temps. L’exposition réunit la plupart des œuvres de cette artiste majeure, en confrontant ses tableaux à ceux d’autres maîtres célèbres, comme Pierre Paul Rubens ou Antoine Van Dyck.

La biographie de Michaelina Wautier est très incertaine. On pense qu’elle est née à Mons vers 1614, dans un environnement qui lui a permis de devenir une femme cultivée, en contact avec de riches commanditaires. Elle s’est installée à Bruxelles avec son frère plus âgé, Charles, peintre lui aussi, avec qui elle a peut-être partagé un atelier. Ils ont vécu ensemble jusqu’en 1689, date du décès de Michaelina.

Être une femme peintre professionnelle, au 17e siècle, ce n’est pas dans les normes, loin de là. Les peintres femmes sont reléguées à la peinture de portraits, de natures mortes et autres tableaux de petits formats. Michaelina Wautier ne s’est pas restreinte à un seul genre, et a peint des thèmes et des formats très variés. Elle s’est illustrée par des peintures d’histoire ambitieuses, un genre alors réservé aux hommes, dont un monumental Triomphe de Bacchus, où elle s’est représentée parmi le cortège bacchique !  Le tableau du Séminaire, représentant le Mariage mystique de sainte Catherine, tableau religieux de grand format, est donc exceptionnel pour une femme peintre. Elle l’a signé « Michaelina Wautier invenit et fecit 1649 », affichant ainsi sa maîtrise, son inventivité et son assurance. C’était alors totalement inédit dans les Pays-Bas espagnols.

Michaelina Wautier a acquis une grande réputation à Bruxelles et compte parmi ses clients l’archiduc Léopold-Guillaume d’Autriche, gouverneur des Pays-Bas espagnols et très grand mécène. Son frère Charles est quant à lui réputé comme portraitiste. Pourtant, tous deux ont été oubliés par l’histoire de l’art jusqu’aux années 2000. Ils sont aujourd’hui considérés comme des représentants importants de la peinture baroque.

Lise Constant et Hélène Cambier (service patrimoine de l’Evêché de Namur)

Merci particulier à Lise Constant (service patrimoine l’Evêché de Namur) qui a coordonné de main de maitre cet ambitieux dossier !

Michaelina Wautier, malerin

Une exposition à voir au Kunsthistorisches Museum de Vienne, jusqu’au 22 février 2026

Pour en savoir plus sur les tableaux :

Fiche d’inventaire du Miracle de saint Eloi

Fiche d’inventaire du Mariage mystique de sainte Catherine 

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